science fiction et culture

Publié le par VinX

J’en ai marre de cet a priori qui veut que la science fiction soit réservée à un public spécialisé, qu’elle aie ses codes complexes, ou son contre-pied qui voudrait qu’elle soit une soupe commerciale à images spectaculaires. Les deux existent mais l’œuvre qui utilise la science fiction n’est pas tributaire nécessairement de ces deux approches.

Le refus massif de l’œuvre de fiction, n’importe laquelle soit elle, qui entretient un rapport avec ce que l’on reconnaît en tant que « science-fiction », est souvent dû à l’ignorance. Un bon nombre d’ouvrages classés sous l’étiquette « SF » rebute un lectorat potentiel du simple fait de cette classification arbitraire – sans elle, il y a fort à parier que le lecteur aurait non seulement lu, mais apprécié, et réfléchi au sens et à la portée de l’œuvre.

Est-il encore porteur de sens, à l’heure du débat éthique sur l’utilisation des nouvelles technologies, d’étiqueter « science fiction » une œuvre qui parle de l’actualité de notre monde ? Le travail de l’éditeur est de vendre, cela ne signifie pas à mes yeux qu’il doive se désolidariser d’une réflexion éthique sur sa pratique. Il manipule des valeurs culturelles, et en dehors de la bonne santé économique, il importe qu’il ne néglige pas la raison d’être de ce qu’il diffuse : des idées, des regards, autant de sources de réflexions et d’influences sur la culture d’une société. Le positionnement éthique que je revendique ne vise en aucun cas à cibler certaines valeurs plutôt que d’autres, mais à s’emparer de ce qui constitue l’essence de la prise de parole aujourd’hui : la liberté d’expression. Je revendique le droit au subversif, à l’innovation, comme le droit au politiquement correcte et à la reproduction de ce qui existe. Les valeurs des éditeurs, liées au « fait de vente », impliquent des choix dictés par le besoin de la santé commerciale. Dans cette perspective, la prise de risque est limitée, et les choix se portent naturellement vers la réplique d’œuvres qui se sont bien vendues. Le cadre de la vente est souvent constitué en partie par les collections – reflets des attentes supposées des consommateurs par rapport aux œuvres mises en vente. C’est très évident en littérature, avec les collections spécialisées en polar, sf, fantasy… Le classement existe parfois au niveau du film ou de la bande dessinée. Il faut croire que l’étiquette, science fiction ou autre, est une sorte d’incontournable commercial pour « aider » le consommateur à se retrouver, à la manière des rayons en grande surface. Le choix des éditeurs est toujours un mélange entre le profil des directeurs éditoriaux et celui des commerciaux. Ce qui fait souci, c’est la façon dont les a-priori sur les œuvres à connotation science-fictive sont véhiculées par les professionnels mêmes qui éditent et diffusent les œuvres. La raison commerciale l’emporte sur la nécessité du discours et de la réflexion sur la sphère dans laquelle se livre le grand enjeu : la culture humaine.

J’insiste sur ce point car la nouvelle ressource de notre civilisation à tendance mondialiste est l’information, et celle-ci est solidaire de la connaissance, et donc nécessairement de la culture. Le combat se livre dans l’esprit de celui qui lit. En suscitant la réflexion, la lecture, en apprenant à aimer les histoires et les images, nous augmentons et fortifions notre culture, car elle n’est rien sans les acteurs qui la vivent, la pensent, la créent, l’intègrent à leurs cadres de vie intérieure et extérieure.

Publié dans De episteme

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P
Il semble bien que la littérature dite contemporaine se singularise par la fin des chapelles, le brouillage des genres, la diversité des pratiques. Fin des certitudes, appropriation de l'ouvert. En cela, SF et poésie se retrouvent jumelles. La littérature est assaut contre les frontières (Kafka)... je signe!
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